Suicide d’adolescents et TikTok : un père en deuil alerte les parents

Après avoir perdu sa fille de 18 ans, un père de famille lance un cri d’alarme. Selon lui, TikTok met entre les mains des adolescents un véritable « mode d’emploi » pour se suicider, via des contenus sombres et dangereux. Son témoignage intervient alors qu’une commission parlementaire vient de rendre un rapport accablant sur les effets psychologiques du réseau social chinois.
Des familles endeuillées qui brisent le silence
En 2024, sept familles ont assigné TikTok en justice, accusant la plateforme d’avoir exposé leurs enfants à des vidéos incitant au passage à l’acte. Parmi elles, Arnaud Ducoin, dont la fille Pénélope s’est donné la mort à 18 ans. Brillante et pétillante, la jeune femme ne présentait « aucun problème psychologique particulier » avant son départ pour une année d’échange aux États-Unis. Mais au bout d’un mois, elle commençait à se scarifier, et fut rapatriée en urgence. Pour ses parents, ce fut le début d’une descente aux enfers.
L’univers mortifère découvert sur TikTok
Diagnostiquée « borderline » et suivie médicalement, Pénélope s’est progressivement isolée, trouvant refuge sur son téléphone. Après sa mort, ses parents ont exploré son ordinateur et découvert un contenu glaçant : vidéos sur la scarification, idées noires, explications techniques autour du suicide.
« C’était un univers mortifère, très sombre. Elle avait accès à un véritable mode d’emploi pour se suicider », raconte son père. Certaines vidéos expliquaient par exemple « comment faire un nœud coulant » ou « combien de temps il faut pour mourir ».
Un algorithme qui contourne la censure
Bien que le mot « suicide » soit censuré sur TikTok, des astuces permettent d’y accéder facilement. L’utilisation de l’emoji du drapeau suisse, par exemple, ouvre la voie à une multitude de vidéos traitant du sujet. Pour Arnaud Ducoin, le réseau n’a pas directement tué sa fille, mais il a « contribué activement » en lui donnant accès à une communauté de jeunes en souffrance, normalisant et amplifiant son mal-être.
Un rapport parlementaire accablant
Ces témoignages rejoignent les conclusions de la commission d’enquête parlementaire, qui a rendu son rapport le 11 septembre 2025. Après six mois de travaux, 180 auditions et 30 000 réponses à une consultation citoyenne (dont 19 000 de lycéens), les députés dressent un constat sombre : TikTok « expose en toute connaissance de cause » les mineurs à des contenus dangereux.
Le rapport dénonce la viralisation de vidéos problématiques, l’exploitation des vulnérabilités psychologiques (addiction, isolement, troubles du sommeil), mais aussi la diffusion d’idéologies contraires aux droits humains, allant du sexisme à l’antisémitisme.
Vers une régulation plus stricte ?
Face à ces constats, deux députés, Arthur Delaporte (PS) et Laure Miller (EPR), recommandent d’interdire l’accès aux réseaux sociaux aux moins de 15 ans, d’instaurer un couvre-feu numérique pour les adolescents de 15 à 18 ans et de mieux réguler les algorithmes. Reste que de nombreux obstacles juridiques compliquent la mise en œuvre de telles mesures.
Pour les familles comme celle d’Arnaud Ducoin, l’urgence est pourtant là : « Les parents doivent savoir ce que leurs enfants peuvent trouver sur TikTok. Derrière un simple écran, il y a parfois un piège mortel. »