
Ma femme me prend pour un incapable…
On dit bien souvent que l’arrivée d’un enfant est un réel bouleversement. Une explosion de joie et de risettes, mais aussi parfois un cataclysme pour certains couples. Marc M., jeune papa d’un loulou de 5 mois, vient aujourd’hui se confier sur une situation qu’il juge comme désespérée…
Avec ma compagne, nous avons toujours été fusionnels. On se connaît depuis l’adolescence et l’idée de faire notre vie ensemble à toujours été une évidence. Pour autant, on a longtemps attendu avant de franchir le cap de la parentalité. On avait les mêmes aspirations et pendant plusieurs années, on a joué les globe-trotteurs, les amants passionnés. Jusqu’au jour où le destin nous a définitivement soudés, une petite crevette allait bientôt débarquer.
Au moment où j’ai su que j’allais être papa, j’étais l’homme le plus heureux au monde. Pas d’angoisse, pas de crainte, pas de paternité tardivement assumée. J’étais déjà père et ma femme déjà maman. Oui, c’était un enfant arrivé plus tôt que prévu et pourtant tellement désiré !
Tout au long de la grossesse, j’ai été aux petits soins pour ma conjointe. Elle, était douce, belle, calme et pas réellement impactée par le bouleversement hormonal. Neuf mois de tendresse, de partage, de confidences… On était comme sur un petit nuage.
Puis notre fils est arrivé. Vraiment arrivé. Il était là, tout rose, enveloppé dans les bras de sa maman, encore tout tremblant. A la seconde même où j’ai posé mes yeux sur lui, je me suis mis à pleurer. A chaudes larmes, comme un petit garçon. Je m’en souviendrais toute ma vie. Un frisson s’est emparé de moi, comme une énergie foudroyante d’une intensité folle qui venait de me faire basculer dans la maturité. J’observais ma femme, attendri, fier et amoureux comme ja
mais, regrettant toutefois qu’elle n’ait pas un regard pour moi. Je sais, c’est un peu égoïste de ma part, mais j’avais envie de voir dans ses yeux cette magie de l’instant. Je n’ai pas relevé sur le moment, me persuadant qu’elle était épuisée et qu’on avait toute la vie devant nous pour nous extasier, en toute harmonie, devant notre petit miracle.
Seulement voilà, j’ai très vite déchanté. Ma compagne a accouché tard le soir, et j’ai passé la première nuit à la maison, loin de mes deux amours. Je n’ai évidemment pas réussi à fermer l’oeil. Au petit matin, au premier pas posé dans les couloirs de la maternité, une chape de plomb s’est abattue sur moi…
A peine entré dans la chambre, j’ai été accueilli avec un regard noir. Ma chérie était là, plutôt pimpante malgré l’épreuve qu’elle venait de vivre. Mais pas un sourire, pas un geste tendre, rien. J’étais arrivé au mauvais moment, notre fils venait de s’endormir et j’allais très certainement le réveiller. J’ai tenté une première approche, ne serait-ce que pour l’observer s’abandonner dans les bras de Morphée, mais la violence des oeillades qu’elle me lançait m’ont très vite refroidi. J’étais comme un étranger dans cette pièce froide et impersonnelle. Alors je suis resté sur ma chaise, sans oser broncher ou même respirer. J’avais lu des tas de choses sur la descente hormonale qui suit l’accouchement. Mais les hormones ont bon dos parfois… Car la descente je la vis encore.
Les premières semaines, j’ai été profondément blessé du comportement de ma femme. La moindre chose que je faisais ou que je suggérais était jugée comme débile et inadaptée. Et elle me le disait sans détour : « faut pas faire comme ça, attention tu vas lui faire mal, essuie-lui mieux le derrière… ». Tout était sujet à la discorde et aux reproches. Pendant un temps, j’ai bien cru que je faisais tout de travers. J’ai eu un doute sur mes capacités en tant que père, j’étais maladroit et très vite paralysé. Et petit à petit, je me suis aperçu qu’elle agissait ainsi avec tout le monde, même avec sa propre maman avec qui elle est pourtant fusionnelle. C’est limite si nous avions le droit d’approcher le bébé et aucun d’entre nous ne savait vraiment comment réagir.
Plus le temps passait, plus je me sentais exclu, comme prisonnier d’un rôle que je n’avais pas choisi, celui de l’intrus. J’avais l’impression de ne pas connaître mon fils, de ne rien partager avec lui. Et par malchance, mon travail fait que je pars très souvent en déplacement, ce qui n’arrange rien.
Un soir, alors que notre petit bout fêtait ses deux mois, j’ai pris mon courage à deux mains pour aborder le sujet. Il fallait que je sois fixé. Et là, un grand blanc. Elle m’a regardé dans les yeux, très froidement, sans émotion ni compassion. Puis après de longues minutes d’un silence assourdissant, elle m’a rétorqué très lentement comme pour imprimer davantage ses paroles dans mon petit cerveau : « tu ne l’aimeras jamais comme je peux l’aimer… ». Elle s’est levée et à rejoint la chambre de notre fils où elle avait pris l’habitude de dormir sur un canapé-lit. J’étais choqué, bouleversé. Comme si la femme qui se trouvait devant moi était une inconnue. Comment pouvait-elle penser de la sorte alors que je ne demandais qu’à être plus présent. Si seulement j’avais eu un peu plus de place…
A partir de ce moment précis, tout a basculé. Je suis entré moi-même dans une dépression, un mal-être profond dont j’avais honte. Je n’en ai parlé à personne, de peur que l’on me juge. Que l’on me dise que c’est de ma faute. On parle souvent des baby-blues des jeunes mamans, mais rarement de ceux des jeunes papas. Et bien j’étais en plein dedans, pieds et poings liés. J’ai bien tenté à plusieurs reprises d’en discuter à nouveau. Mais nous n’avions plus de moments d’intimité, elle était obsédée par notre enfant. Je n’existais plus.
Il y a quelques semaines, j’ai décidé de partir. De laisser derrière moi le rêve auquel je tenais tant, que je touchais du bout des doigts. Celui d’avoir une famille aimante, que je protégerai jusqu’à la fin des temps. J’avoue que j’espérais la voir réagir au moment de boucler mes valises. Mais une fois encore, elle m’a tourné le dos. Encore à ce jour je ne comprends pas. Je ne comprends plus qui elle est et surtout, qui je suis dans toute cette histoire. J’ai l’impression qu’on m’a volé ma vie, volé mon être. Je ne suis plus que le fantôme de moi-même à la recherche d’un avocat… »

Le SAV des parents…
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